lundi 20 décembre 2010

Corées, un début de semaine finalement assez calme


Un mois après le bombardement meurtrier de l'île sud-coréenne de Yeonpyeong par Pyongyang, la Corée du Sud montre ses muscles. Malgré les menaces de représailles armées de la Corée du Nord, Séoul a effectué, ce lundi, sur Yeonpyeong des manœuvres militaires à tirs d'artillerie réels. 2.000 obus ont été lancés en direction de la mer. Ces manœuvres se sont déroulées sous haute-tension. Pyongyang a promis ce week-end un «désastre» si la Corée du Sud maintenait ses exercices. «Nous punirons sans pitié les provocateurs qui envahiraient notre territoire souverain», avait averti le ministre nord-coréen des Affaires étrangères. Lors d'exercices similaires menés le 23 novembre dernier par l'armée sud-coréenne, Pyongyang avait affirmé que les tirs du Sud étaient tombés dans ses eaux territoriales et avait lancé sur Yeonpyeong 170 obus, tuant deux civils et deux militaires.


Evacuation de Yeonpyeong

C'est pourquoi Séoul a demandé lundi aux habitants de Yeonpyeong et de quatre autres îles voisines, de se réfugier dans les abris anti-attaque aérienne pendant toute la matinée. Une consigne similaire a été communiquée à toutes les îles de la mer Jaune, frontalières de la Corée du Nord. La Corée du Sud a également mis sa flotte aérienne en alerte, faisant décoller ses bombardiers F15 pour faire face à d'éventuelles représailles du Nord. Pour le moment, Pyongyang semble entendre les appels au calme. L'armée nord-coréenne, qui dénonce «une provocation imprudente», a estimé en fin de matinée qu'il n'était «pas la peine de réagir» aux manœuvres. Victoire pour Séoul? tactique de contre-bluff?

Ces exercices sud-coréens ne font pas l'unanimité dans la communauté internationale. Initialement prévus samedi, les exercices militaires d'aujourd'hui ont permis au Conseil de Sécurité de l'ONU de se réunir ce week-end. Les cinq puissances ont pris le temps de ne... rien décider. Quelques déclarations, c'est tout.
La Chine, seul alliée de poids du régime communiste de Kim Jong-il, a lancé un appel au calme et critiqué implicitement Séoul, déclarant que «nul n'a le droit de susciter un conflit et nul n'a le droit de provoquer des effusions de sang entre les peuples du Nord et du Sud». «La péninsule était au bord d'un conflit armé. Les parties doivent renoncer à toute action pouvant provoquer une escalade», a jugé Moscou. En revanche, les Etats-Unis, traditionnel protecteur de Séoul, ont soutenu les exercices. Vingt militaires américains étaient présents en tant qu'observateurs ce matin.

La Corée du Sud a souligné que ces manœuvres «routinières» relèvent de sa souveraineté. Avec ces exercices, Séoul, chercherait, selon certains experts, à montrer sa détermination face aux menaces nord-coréennes. La réponse du gouvernement au bombardement de fin novembre et au naufrage en mars d'une de ses corvettes, le Cheonan, probablement torpillée par le Nord, ont été jugée insuffisantes par l'opinion publique sud-coréenne.


Cette démonstration de force survient alors même que Pyongyang paraît prêt à faire des concessions sur le dossier du nucléaire. Selon CNN, les Nord-Coréens seraient disposés à laisser les membres de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) visiter son site nucléaire ultramoderne de Yongbyon. Les inspecteurs de l'AIEA avaient dû quitter la Corée du Nord en avril 2009 et Pyongyang avait retiré tous les équipements de surveillance de Yongbyon. La Corée du Nord autoriserait également l'envoi à l'étranger des barres de combustibles nécessaires à l'enrichissement de l'uranium. Elle accepterait aussi la création d'une commission et la mise en place d'un téléphone rouge entre les deux Corées et les Etats-Unis, croit savoir CNN.


Fin d'année 2010 : la Corée du Sud reste engluée dans une image de Guerre Froide...


Plus que l’inquiétude d’une guerre, ce sont la lassitude et la frustration qui prédominent chez les Sud-Coréens aujourd’hui. Il y a environ un mois s’achevait le sommet du G20 de Séoul, dont l’organisation réussie devait montrer au monde entier une nation prospère, sûre de ses forces et de son destin. Mais se sont les images de l’île de Yeonpyeong bombardée par le Nord puis celles de manoeuvres militaires à grand renfort de porte-avions américain qui tournent en boucle dans le monde entier, depuis près d'un mois.
Au delà du danger réel que représente le Nord, toute la frustration des Sud-Coréens est résumée là : parvenue au cercle très prisé des nations riches, la Corée du Sud est maintenant en quête de reconnaissance internationale, mais les rares moments de célébrité dont elle jouit viennent de ses déboires avec sa soeur ennemie, et au cours desquels le Sud apparaît chaque fois comme victime impuissante ou comme valet des Américains. Séoul est sans doute la ville la plus high-tech au monde mais doit vivre, huit fois par an, au son des sirènes annonçant le "minbangui", l'exercice de défense civile. Les jeunes Coréens sont parmi les mieux éduqués au monde mais les garçons sont obligés de servir leur pays pendant 2 ans !
Le mécontentement des Coréens du Sud ne concerne pas seulement le Nord mais aussi leur propre gouvernement. En 2007, le Président Lee Myung-bak est élu sur une ligne de fermeté vis-à-vis de la Corée du Nord. Arrivé au pouvoir, il met fin à la politique d’ouverture ("Sunshine policy") et au programme d’aide inconditionnelle mis en place par son prédécesseur, arguant que cette stratégie n’a donné aucun résultat.

Lee Myung-bak : un Genkidama insuffisant

Impuissance militaire donc, mais impuissance diplomatique également vu que les clés du problème coréen sont bien plus dans les mains des Etats-Unis, dont la Nord cherche la reconnaissance et la garantie de non agression, et de la Chine qui seule, possède un moyen de pression sur le régime nord-coréen, que dans celles du pays du matin clair (et non calme).

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